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jeudi 28 mai 2020

Catlaine écrit... Quand les passions se rejoignent


"Nous sommes au complet, nous pouvons commencer. Toi, le petit, avance d'un pas !

- Moi ? dit une voix assurée en bombant le torse

- Non pas toi, ton voisin ! »

Son voisin avance d’un pas tremblant puis tente d’avancer à nouveau mais la voix retentit

« STOP ! Tu ne sais pas compter, je t’ai dit UN pas !

- Désolé, répond-il timidement

- Toi là-bas, c’est ton tour ! »

Ne sachant lequel est désigné, il s’ensuit une formidable mêlée ou chacun essaie de se déplacer en même temps que son acolyte. Tandis que certains se recroquevillent,

peureux et roulant des yeux comme des billes, d’autres se mettent à crier et à jouer des coudes. C’est alors qu’un hurluberlu habillé d’un costume bigarré fend la foule en envoyant certains dans les airs qui retombent sur les fesses, la tête dodelinant sous le choc !

Il s’immobilise, se tourne vers eux en effectuant un saut de chat. On entend des « Oh ! » et des « Ah ! » tandis qu’il semble flotter dans les airs puis retombe souplement sur ses pieds.

« Cela suffit jeunes gens ! Ceux qui ne se sentent pas bien peuvent se rendre à l’infirmerie, les autres reprenez votre place ! »

Près de la moitié d’entre eux s’éloignent, les autres retrouvant leur place.

« C’est toi, qui doit avancer d’un pas ! » retentit la voix de stentor

Le petit s’exécute en regardant le sol, honteux et craignant que la foudre ne s’abatte sur lui, au sens propre comme au figuré car on entend au loin l’orage gronder. Le ciel s’est assombri et un léger courant d’air donne le frisson ; les feuilles mortes glissent sur le sol comme transportées sur un tapis roulant.

Une dame portant cape et chapeau surgit d’un angle et se dresse, autoritaire ; elle se déplace, comme en lévitation, droit devant elle en toisant ceux qu’elle croise et bousculant au passage un petit bonhomme. Soudain, elle se fige, lève la tête vers le ciel. Chacun retient son souffle mais rien ne se passe, même le vent semble s’être subitement arrêté. Un éclair illumine l’espace puis une explosion secoue l’atmosphère mais aucune goutte de pluie ne tombe encore.

« Continuons ! » tonne la voix

Ils reprennent leurs esprits et leurs positions, les mouvements s’enchainent en silence. Personne ne s’est aperçu qu’une jeune femme à la peau diaphane et au port de tête royal s’est avancé sur ses pointes, petit à petit, jusqu’à faire face à l’hurluberlu au costume bigarré ; il la salue retirant sa coiffe rigolote et pliant un genou avec un sourire malicieux. Il exécute une pirouette et se fige, attendant un ordre qui ne vient pas.

Le vent souffle plus fort, les feuilles se soulèvent maintenant et entament des tourbillons pour s’élever encore plus haut. Une ou deux gouttes par ci par là marquent le sol, il faudrait peut-être trouver un abri.

Des sabots frappent le sol, le cheval se cabre puis hennit, il attend les ordres de son cavalier qui maintient les rennes.

« Tout doux mon ami, tout doux » murmure-t-il à l’oreille de son destrier en lui caressant l’encolure.

Dans le parc, les parents rassemblent le pique-nique tandis que les enfants ramassent leurs jouets, certains courent après leur chapeau. Les branches des grands arbres sont secouées et laissent tomber leurs fleurs en neige blanche toute douce et légère. Les écureuils sautillent sur la pelouse pour rejoindre leur maison sans oublier de ramasser quelques glands au passage.

Le cavalier en observation avance lentement puis tourne à droite. C’est ce moment que choisit la dame en cape et en chapeau pour avancer, en pas chassés, vers la jeune femme à la peau diaphane et au port de tête royal mais c’est sans compter sur un petit bonhomme que l’on avait oublié là, obligeant la dame à s’immobiliser. Elle le regarde de toute sa hauteur et, d’un geste de la main, lui fait signe de se pousser.

L’hurluberlu et la jeune femme entament un pas de deux, elle termine sa course en tours fouettés à quelques mètres de là.

Des corbeaux se mettent à croasser et des nuées d’oiseaux s’échappent de la cime des arbres, tous se préparent à la tempête.

« N’ayez pas peur, nous avons bientôt fini ! » l’homme à la voix de stentor avance d’un pas, pointe droite en avant, il pose son pied en troisième, les bras en première position, le menton levé et le regard tourné vers le cavalier.

Le cavalier protecteur avance puis tourne à nouveau à droite.

« Nicolas ! Tu es encore là, à cette table à rêvasser. Viens par ici, nous devons partir il va se mettre à pleuvoir.

- Désolé les gars, ma mère m’appelle, on doit rentrer. »

L’enfant prend son sac à dos, l’ouvre bien grand. Il regarde la table en pierre quadrillée de noir et de blanc. Dans un geste ample du bras, il fait tomber toutes les pièces de son jeu d’échec au fond de son sac. Nicolas peut entendre des cris lointains accompagner la chute du roi, de la reine, de leurs protecteurs et ennemis, de leurs sujets. Le cheval se fige en position cabrée, les pions s’immobilisent dans un soupir espérant bientôt pouvoir se réveiller à nouveau pour jouer. Le petit garçon sert bien fort le cordon de fermeture et court vers sa mère.

« Dépêche-toi, monte dans la voiture. »

Après une courte distance, la maman se gare le long d’un trottoir. Nicolas ouvre la portière en serrant son sac à dos contre lui, il sort de la voiture et grimpe quelques marches.

« A tout à l’heure mon chéri, lui crie sa mère

- Ouais » répond-il avec un sourire

Il est enfin à l’abri, un brouhaha rassurant s’élève couvrant presque les notes de piano. Nicolas pose son sac au sol, il se déshabille et enfile son justaucorps. Le professeur fait résonner sa baguette sur le parquet rappelant à l’ordre les petits rats.

« Nous sommes au complet, nous pouvons commencer. »



4 commentaires:

  1. Catelaine cette fois nous fait léviter dans le temps et l'histoire bravo pour m'avoir volontairement perdu puis retrouvé. Je suus conquise...

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  2. On est bien dans l'ambiance bien dans l'atmosphère on ressent bien tous ces personnages et leur caractère. Jolie partie !

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